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Lyn Mer 8 Juil - 1:28Nom : Elle se nomme véritablement Jen'zua, mais s'est faite connaître sous le pseudonyme Lyn.
Race : Trollesse
Age : 23 ans
Taille : 1,95m
Corpulence : Comme toutes celles de sa race, très longiligne et toute en muscle.
Spécialité/classe : Voleur
Assise devant son petit feu de camp, en plein Durotar, Lyn contemplait les reflets pourpres que prenaient les lames de son arme de poing. Bien qu'elle possédât plusieurs couteaux et une dague de moyenne facture, c'était cette arme qui avait sa préférence : plus d'une fois ces lames lui avaient sauvé la mise, et elles étaient celles qui s'imprégnaient le mieux de ses différents poisons. Mais penser à cette arme lui rappela alors un autre feu... une autre époque... les îles Echos...
« Jen'zua ! »
La jeune trollesse aux yeux rouges leva la tête en direction des cris affolés de sa mère, décidant d'abandonner là sa partie de pêche, et courut à la rencontre de celle-ci ; elle gagna presque les premiers arbres lorsque sa mère apparut soudain et la prît par les épaules.
« Jen'zua, écoute moi. Zalazane est devenu fou, il veut s'emparer du village et nous asservir. Il a tué les plus puissants des nôtres, il a tué Minshina ! »
Jen'zua ne parvenait pas à saisir ce que sa mère lui disait, tout était trop confus, trop absurde pour que son esprit l'accepte. Zalazane? Avide de pouvoir?
« Enfuis-toi. Loin, vite. Nage jusqu'à la côte et pars à Cabestan, la cité Gobeline : elle est neutre, tu pourras t'y cacher. Zalazane ne t'y poursuivra pas. Suis la route puis prend à l'ouest au grand croisement et traverse la rivière, tu devrais pouvoir demander ton chemin par la suite.
- Viens avec moi !
- Non Jen'zua. Tu es assez mûre à présent pour te débrouiller seule : tu es une trollesse. Tu n'es pas faible. Si tu as une chance de partir je refuse de la compromettre, il est déjà trop tard pour moi. Pars maintenant, pars si tu m'aimes ! »
Elle serra sa fille contre elle en l'embrassant sur le front, lui transmit une vieille dague, une petite bourse en cuir remplie de quelques piécettes ainsi qu'une outre d'eau et lui donna une petite tape pour la pousser vers la berge. Puis elle disparut sous le couvert des arbres, laissant Jen'zua seule.
N'ayant d'autre choix que celui d'obéir au dernier souhait de sa mère, Jen'zua s'élança vers la mer pour rejoindre les côtes. De la berge de Durotar, elle regarda les îles, son village, son « chez elle » : un immense feu brûlait derrière les arbres, vomissant une fumée noir dans le ciel d'azur. Serrant les poings, elle décida de partir sans se retourner. Elle était une trollesse. Elle n'était pas faible.
Elle marcha alors en direction de la grande Cabestan, la cité dont elle avait tant entendu parler les marchands, enfermée dans une situation qu'elle ne comprenait pas. Elle pêchait pour se nourrir, s'arrêtait dans les rares points d'eau qu'elle croisait pour remplir sa gourde, et marchait inlassablement. « Je suis une trollesse, je ne suis pas faible. ». C'était devenu une litanie qui tournait sans cesse dans sa tête, lui embrumant l'esprit pour l'empêcher de se remémorer le reste.
Une semaine passa, et elle vit enfin le petit pont qui traversait la rivière, la limite à l'univers qu'elle connaissait ; elle ne l'aurait jamais admis mais elle avait peur, peur de ce qu'elle pourrait trouver, peur d'être rejetée, peur de ne pas savoir se battre seule pour survivre. Elle continua néanmoins, réfrénant ses sentiments, désireuse de faire honneur à sa race et à sa mère.
Les Tarides lui plaisaient. Malgré le soleil de plomb, la végétation était plus abondante et la faune plus diversifiée qu'à Durotar, et elle pût manger de la viande à sa faim : les gazelles offraient une viande un peu coriace mais elle avait déjà connu bien pire. Elle croisa quelques fermiers et marchands qui lui indiquèrent la grande cité, et s'ils furent étonnés de rencontrer une jeune trollesse en ces terres ils ne le montrèrent pas.
Une semaine de voyage lui fût nécessaire pour apercevoir les abords de Cabestan : elle y parvînt en début de soirée. Bien qu'elle ne sût pas exactement à quoi s'attendre, elle fût réellement surprise de l'aspect de celle-ci : on eût dit que les différents bâtiments et maisons avaient poussé dans tous les sens, de toutes les hauteurs, sans aucune concertation préalable. C'était un incroyable pot-pourri de couleurs et de matières différentes, de petites rues qui ne suivaient aucune logique, de pancartes surprenantes. Jen'zua aima tout de suite cet endroit : il y régnait la même confusion que dans son esprit, et la ville était pourtant bouillonnante de vie.
En s'approchant elle pût enfin observer les gardes : la première fois qu'elle voyait pareils Gobelins. Petits et râblés, ils étaient vêtus d'une armure hérissée par endroit de pics de métal, et portaient pour la plupart plusieurs armes. Leur air mauvais suffisait souvent à décourager les visiteurs malhonnêtes de troubler la relative neutralité de la ville, et permettait aussi aux Gobelins résidents de ne craindre aucun vol. Il en allait évidemment autrement pour les marchands d'autres races.
Jen'zua ne pût s'empêcher de remarquer son propre accoutrement, miteux pour autant qu'elle pût en juger : elle ne portait qu'un gilet et un pagne de cuir, tous deux usés et troués par endroits, sa petite bourse accrochée à une fine cordelette autour de ses hanches. Sa peau d'ordinaire bleutée salie par la poussière et ses cheveux rouges emmêlés n'arrangeaient en rien son allure, ses immenses cernes et son dos courbaturé non plus ; elle pria pour que les gardes acceptent de la laisser entrer sans lui poser trop de questions.
Elle s'avança donc, en relevant fièrement la tête. Un troll ne se laisse pas intimider. Une trollesse non plus. Elle retînt légèrement son souffle au passage devant le poste de garde, prenant le parti de ne pas les regarder pour ne pas se trahir, et entra finalement dans la ville sans encombre autre qu'un soupir méprisant d'un des gardes. Ses instincts reprirent soudain le contrôle de ses émotions et elle faillît lui demander quel était son problème, puis elle se rappela à qui elle avait à faire.
La foule la déroutait. Marchands, voyageurs, résidents, combattants en quête de gloire... tous cohabitaient dans une paix plutôt précaire, mais faisaient tout de même affaire ensemble. Elle remarqua de puissants guerriers portant d'impressionnants trophées, de toutes races. Elle vît même quelques Trolls, mais de tribus qu'elle n'avait jamais vues ; aussi elle hésita à leur demander son chemin vers l'auberge la plus proche, et se rabattit sur un Gobelin qui passait par là. Il lui indiqua dans un grognement un bâtiment à l'aspect plutôt rebutant, avant de continuer sa route en lui jetant un coup d'œil soupçonneux.
Se frayant un chemin jusqu'à l'auberge, Jen'zua se cramponna à sa bourse pour éviter un vol : elle savait avoir assez de poigne pour pouvoir retenir le petit sac, au pire pour le déchirer. Elle entra donc, un peu intimidée, dans la salle sombre et alla directement s'accouder au bar où un Orc peu commode lui servit de la mauvaise bière. Alors seulement, elle s'autorisa à réfléchir à sa situation. Elle était seule, sans aucun parent connu, sans tribu, sans objets de valeur. Elle n'avait que très peu d'argent, peut-être l'équivalent de quelques nuits à l'auberge. Et, plus que tout, elle n'avait aucune idée de ce qu'elle allait pouvoir faire : il lui faudrait apprendre à se battre, mais qui accepterait de lui enseigner sans rétribution? Il fallait qu'elle travaille, mais son seul savoir se résumait en une certaine connaissance des plantes et de la façon de les harmoniser en décoctions. De plus une trollesse, seule et aussi jeune, n'inspirerait pas confiance. Personne ne prendrait le risque de l'embaucher.
Comment donc allait-elle survivre? Allait-il falloir qu'elle vole pour avoir de quoi subsister?
Elle décida que la nuit lui porterait conseil : elle était trop fatiguée pour penser correctement, réfléchir ainsi des heures ne la mènerait à rien. Elle demanda donc une chambre à l'aubergiste qui exigea qu'elle paye avant de passer la nuit, puis qui l'emmena à l'étage supérieur dans une chambre exigüe mais relativement propre. Elle prit soin de dissimuler sa petite bourse sous la paillasse, et tomba endormie comme une masse.
Le lendemain comme les autres jours, elle chercha en vain du travail. Elle finît par devoir sortir de la ville pour dormir et se nourrir, avant de se rendre compte qu'elle ne pouvait continuer ainsi. Il lui fallait de l'argent... et tant pis si elle devait pour cela délester certains bourgeois de leurs effets.
Elle se posta dans une rue marchande bondée, en quête de la proie facile, et attendit. Puis elle le vît : un humain au regard méprisant, trois énormes bourses pendant à sa ceinture probablement pleines de pièces d'or ou de joyaux. Le sang de Jen'zua ne fît qu'un tour, c'étaient les humains de Kul Tiras qui avaient attaqué les îles Echos, les humains qui avaient contraint les mâles les plus forts à partir en guerre, les humains qui avaient vidé leurs îles et donc permis à Zalazane de prendre le contrôle des trolls restants. Elle allait non seulement prendre de quoi subvenir à ses besoins, mais aussi venger dans la mesure de ses moyens l'affront qu'avait subi sa tribu... et sentait monter l'adrénaline.
Elle s'avança doucement vers l'homme, le suivant à quelques pas en arrière au milieu de la foule, puis choisît le bon moment pour plonger : il s'était penché vers un étalage de bijoux très ouvragés. Elle saisit une des bourses, en trancha le haut avec sa petite dague et continua son chemin sans que personne n'ait pu remarquer le larcin. Cela la galvanisa et lui fît ressentir une liesse incroyable, non seulement elle avait réussi mais elle en avait éprouvé un plaisir certain. Elle se camoufla pour attacher le sac de pièces à sa ceinture improvisée et le tînt fermement pour éviter qu'on le lui vole à son tour.
Le coeur léger, elle se rendît dans une auberge un peu plus loin afin de savourer un vrai repas ou tout au moins ce qui pourrait s'en approcher le plus. Elle choisît une table dans le fond de la pièce et commanda le plat du jour, des côtelettes de lion dont les effluves embaumaient agréablement la salle. Alors qu'elle allait manger sa première bouchée, une silhouette encapuchonnée de noir vînt s'asseoir à sa table et un bras décharné en sortît, pour planter une dague dans le bois vermoulu. Jen'zua sursauta puis empoigna sa propre dague, prête à vendre chèrement sa peau. Une voix d'outre-tombe aux improbables intonations féminines se fît alors entendre :
« Bonjour mignonne. C'est que tu te débrouillerais pas trop mal pour une novice mais dis-moi, tu pensais pouvoir passer combien de temps ici sans que l'on te remarque?
- …Qui es-tu et que me veux-tu?
- On m'avait bien dit que les trollesses étaient farouches. Bien, dans ce cas allons-y de façon plus directe : si tu restes ici plus longtemps sans avoir la moindre idée du fonctionnement de la ville, tu finiras au mieux plumée. Au pire bouillie.
- Et en quoi est-ce que cela te concerne?
- Ca me concerne que je suis en train de me chercher un apprenti, et qu'il serait gâché que de te voir en prison. Le métier devient dur seule, j'aurais besoin d'un aide à qui transmettre mon savoir. Mon... art.
- Métier? Art? C'est à dire?
- Mais le vol et l'assassinat, bien évidemment mon coeur. Si tu acceptes de m'aider dans mes affaires, je te montrerais et t'enseignerais ce que je sais. Tout ce que je veux en échange est que tu obéisses aveuglément à ce que je te demanderais, sans t'encombrer de morale ou d'une quelconque idée de justice. Si tu n'es pas en mesure de me donner ce que j'exige, je te laisserais. Mais tu ne tiendras pas deux jours de plus.
Jen'zua réfléchît quelques instants puis accepta, vaincue. C'était sa première rencontre avec Delia, son mentor, son professeur, mais aussi au fil du temps son amie. Elle était une Mort-vivante qui avait renié toute allégeance pour poursuivre sa carrière d'Assassin, sévissant surtout dans les villes neutres telles celles des Gobelins. Elle avait acquis une bonne réputation au fil de ses contrats et pouvait se permettre une certaine notoriété.
Elle avait initié Jen'zua aux bases de son Art en six mois, puis lui avait donné son surnom, Lyn, en mémoire de celle qui lui avait tout appris. Elle portait de grands espoirs en la jeune trollesse, sachant qu'un jour elle la surpasserait. Mais elle ne devait jamais voir ce jour.
Au cours d'un contrat, trois années plus tard, elle se fît tuer. Leur employeur les avaient dupées et avait envoyé une dizaine de tueurs les accueillir ; seule Lyn avait pu en réchapper, emportant avec elle l'arme de poing que Delia lui avait offerte avant de mourir. Elle la vengea la semaine suivante, en tuant puis découpant en dix morceaux leur précédent employeur, se jurant de ne plus jamais accorder sa confiance à personne. Son arme de poing serait là pour le lui rappeler, à toute heure.
C'était cette même arme dont elle regardait les lames luire sous les flammes. Après avoir évoqué ses souvenirs, Lyn se rendît compte de l'heure tardive. Il était important qu'elle dorme, elle avait rendez-vous le lendemain à Orgrimmar avec un riche commanditaire. Elle travaillait seule depuis plusieurs années, mais rien ni personne n'avait su remplacer la compagnie de son ancien professeur : une haine froide et calculatrice coulait en elle, repoussant tout les autres sentiments qu'elle aurait pu éprouver. Elle était seule, à nouveau. Mais elle n'avait plus peur.
Race : Trollesse
Age : 23 ans
Taille : 1,95m
Corpulence : Comme toutes celles de sa race, très longiligne et toute en muscle.
Spécialité/classe : Voleur
Assise devant son petit feu de camp, en plein Durotar, Lyn contemplait les reflets pourpres que prenaient les lames de son arme de poing. Bien qu'elle possédât plusieurs couteaux et une dague de moyenne facture, c'était cette arme qui avait sa préférence : plus d'une fois ces lames lui avaient sauvé la mise, et elles étaient celles qui s'imprégnaient le mieux de ses différents poisons. Mais penser à cette arme lui rappela alors un autre feu... une autre époque... les îles Echos...
« Jen'zua ! »
La jeune trollesse aux yeux rouges leva la tête en direction des cris affolés de sa mère, décidant d'abandonner là sa partie de pêche, et courut à la rencontre de celle-ci ; elle gagna presque les premiers arbres lorsque sa mère apparut soudain et la prît par les épaules.
« Jen'zua, écoute moi. Zalazane est devenu fou, il veut s'emparer du village et nous asservir. Il a tué les plus puissants des nôtres, il a tué Minshina ! »
Jen'zua ne parvenait pas à saisir ce que sa mère lui disait, tout était trop confus, trop absurde pour que son esprit l'accepte. Zalazane? Avide de pouvoir?
« Enfuis-toi. Loin, vite. Nage jusqu'à la côte et pars à Cabestan, la cité Gobeline : elle est neutre, tu pourras t'y cacher. Zalazane ne t'y poursuivra pas. Suis la route puis prend à l'ouest au grand croisement et traverse la rivière, tu devrais pouvoir demander ton chemin par la suite.
- Viens avec moi !
- Non Jen'zua. Tu es assez mûre à présent pour te débrouiller seule : tu es une trollesse. Tu n'es pas faible. Si tu as une chance de partir je refuse de la compromettre, il est déjà trop tard pour moi. Pars maintenant, pars si tu m'aimes ! »
Elle serra sa fille contre elle en l'embrassant sur le front, lui transmit une vieille dague, une petite bourse en cuir remplie de quelques piécettes ainsi qu'une outre d'eau et lui donna une petite tape pour la pousser vers la berge. Puis elle disparut sous le couvert des arbres, laissant Jen'zua seule.
N'ayant d'autre choix que celui d'obéir au dernier souhait de sa mère, Jen'zua s'élança vers la mer pour rejoindre les côtes. De la berge de Durotar, elle regarda les îles, son village, son « chez elle » : un immense feu brûlait derrière les arbres, vomissant une fumée noir dans le ciel d'azur. Serrant les poings, elle décida de partir sans se retourner. Elle était une trollesse. Elle n'était pas faible.
Elle marcha alors en direction de la grande Cabestan, la cité dont elle avait tant entendu parler les marchands, enfermée dans une situation qu'elle ne comprenait pas. Elle pêchait pour se nourrir, s'arrêtait dans les rares points d'eau qu'elle croisait pour remplir sa gourde, et marchait inlassablement. « Je suis une trollesse, je ne suis pas faible. ». C'était devenu une litanie qui tournait sans cesse dans sa tête, lui embrumant l'esprit pour l'empêcher de se remémorer le reste.
Une semaine passa, et elle vit enfin le petit pont qui traversait la rivière, la limite à l'univers qu'elle connaissait ; elle ne l'aurait jamais admis mais elle avait peur, peur de ce qu'elle pourrait trouver, peur d'être rejetée, peur de ne pas savoir se battre seule pour survivre. Elle continua néanmoins, réfrénant ses sentiments, désireuse de faire honneur à sa race et à sa mère.
Les Tarides lui plaisaient. Malgré le soleil de plomb, la végétation était plus abondante et la faune plus diversifiée qu'à Durotar, et elle pût manger de la viande à sa faim : les gazelles offraient une viande un peu coriace mais elle avait déjà connu bien pire. Elle croisa quelques fermiers et marchands qui lui indiquèrent la grande cité, et s'ils furent étonnés de rencontrer une jeune trollesse en ces terres ils ne le montrèrent pas.
Une semaine de voyage lui fût nécessaire pour apercevoir les abords de Cabestan : elle y parvînt en début de soirée. Bien qu'elle ne sût pas exactement à quoi s'attendre, elle fût réellement surprise de l'aspect de celle-ci : on eût dit que les différents bâtiments et maisons avaient poussé dans tous les sens, de toutes les hauteurs, sans aucune concertation préalable. C'était un incroyable pot-pourri de couleurs et de matières différentes, de petites rues qui ne suivaient aucune logique, de pancartes surprenantes. Jen'zua aima tout de suite cet endroit : il y régnait la même confusion que dans son esprit, et la ville était pourtant bouillonnante de vie.
En s'approchant elle pût enfin observer les gardes : la première fois qu'elle voyait pareils Gobelins. Petits et râblés, ils étaient vêtus d'une armure hérissée par endroit de pics de métal, et portaient pour la plupart plusieurs armes. Leur air mauvais suffisait souvent à décourager les visiteurs malhonnêtes de troubler la relative neutralité de la ville, et permettait aussi aux Gobelins résidents de ne craindre aucun vol. Il en allait évidemment autrement pour les marchands d'autres races.
Jen'zua ne pût s'empêcher de remarquer son propre accoutrement, miteux pour autant qu'elle pût en juger : elle ne portait qu'un gilet et un pagne de cuir, tous deux usés et troués par endroits, sa petite bourse accrochée à une fine cordelette autour de ses hanches. Sa peau d'ordinaire bleutée salie par la poussière et ses cheveux rouges emmêlés n'arrangeaient en rien son allure, ses immenses cernes et son dos courbaturé non plus ; elle pria pour que les gardes acceptent de la laisser entrer sans lui poser trop de questions.
Elle s'avança donc, en relevant fièrement la tête. Un troll ne se laisse pas intimider. Une trollesse non plus. Elle retînt légèrement son souffle au passage devant le poste de garde, prenant le parti de ne pas les regarder pour ne pas se trahir, et entra finalement dans la ville sans encombre autre qu'un soupir méprisant d'un des gardes. Ses instincts reprirent soudain le contrôle de ses émotions et elle faillît lui demander quel était son problème, puis elle se rappela à qui elle avait à faire.
La foule la déroutait. Marchands, voyageurs, résidents, combattants en quête de gloire... tous cohabitaient dans une paix plutôt précaire, mais faisaient tout de même affaire ensemble. Elle remarqua de puissants guerriers portant d'impressionnants trophées, de toutes races. Elle vît même quelques Trolls, mais de tribus qu'elle n'avait jamais vues ; aussi elle hésita à leur demander son chemin vers l'auberge la plus proche, et se rabattit sur un Gobelin qui passait par là. Il lui indiqua dans un grognement un bâtiment à l'aspect plutôt rebutant, avant de continuer sa route en lui jetant un coup d'œil soupçonneux.
Se frayant un chemin jusqu'à l'auberge, Jen'zua se cramponna à sa bourse pour éviter un vol : elle savait avoir assez de poigne pour pouvoir retenir le petit sac, au pire pour le déchirer. Elle entra donc, un peu intimidée, dans la salle sombre et alla directement s'accouder au bar où un Orc peu commode lui servit de la mauvaise bière. Alors seulement, elle s'autorisa à réfléchir à sa situation. Elle était seule, sans aucun parent connu, sans tribu, sans objets de valeur. Elle n'avait que très peu d'argent, peut-être l'équivalent de quelques nuits à l'auberge. Et, plus que tout, elle n'avait aucune idée de ce qu'elle allait pouvoir faire : il lui faudrait apprendre à se battre, mais qui accepterait de lui enseigner sans rétribution? Il fallait qu'elle travaille, mais son seul savoir se résumait en une certaine connaissance des plantes et de la façon de les harmoniser en décoctions. De plus une trollesse, seule et aussi jeune, n'inspirerait pas confiance. Personne ne prendrait le risque de l'embaucher.
Comment donc allait-elle survivre? Allait-il falloir qu'elle vole pour avoir de quoi subsister?
Elle décida que la nuit lui porterait conseil : elle était trop fatiguée pour penser correctement, réfléchir ainsi des heures ne la mènerait à rien. Elle demanda donc une chambre à l'aubergiste qui exigea qu'elle paye avant de passer la nuit, puis qui l'emmena à l'étage supérieur dans une chambre exigüe mais relativement propre. Elle prit soin de dissimuler sa petite bourse sous la paillasse, et tomba endormie comme une masse.
Le lendemain comme les autres jours, elle chercha en vain du travail. Elle finît par devoir sortir de la ville pour dormir et se nourrir, avant de se rendre compte qu'elle ne pouvait continuer ainsi. Il lui fallait de l'argent... et tant pis si elle devait pour cela délester certains bourgeois de leurs effets.
Elle se posta dans une rue marchande bondée, en quête de la proie facile, et attendit. Puis elle le vît : un humain au regard méprisant, trois énormes bourses pendant à sa ceinture probablement pleines de pièces d'or ou de joyaux. Le sang de Jen'zua ne fît qu'un tour, c'étaient les humains de Kul Tiras qui avaient attaqué les îles Echos, les humains qui avaient contraint les mâles les plus forts à partir en guerre, les humains qui avaient vidé leurs îles et donc permis à Zalazane de prendre le contrôle des trolls restants. Elle allait non seulement prendre de quoi subvenir à ses besoins, mais aussi venger dans la mesure de ses moyens l'affront qu'avait subi sa tribu... et sentait monter l'adrénaline.
Elle s'avança doucement vers l'homme, le suivant à quelques pas en arrière au milieu de la foule, puis choisît le bon moment pour plonger : il s'était penché vers un étalage de bijoux très ouvragés. Elle saisit une des bourses, en trancha le haut avec sa petite dague et continua son chemin sans que personne n'ait pu remarquer le larcin. Cela la galvanisa et lui fît ressentir une liesse incroyable, non seulement elle avait réussi mais elle en avait éprouvé un plaisir certain. Elle se camoufla pour attacher le sac de pièces à sa ceinture improvisée et le tînt fermement pour éviter qu'on le lui vole à son tour.
Le coeur léger, elle se rendît dans une auberge un peu plus loin afin de savourer un vrai repas ou tout au moins ce qui pourrait s'en approcher le plus. Elle choisît une table dans le fond de la pièce et commanda le plat du jour, des côtelettes de lion dont les effluves embaumaient agréablement la salle. Alors qu'elle allait manger sa première bouchée, une silhouette encapuchonnée de noir vînt s'asseoir à sa table et un bras décharné en sortît, pour planter une dague dans le bois vermoulu. Jen'zua sursauta puis empoigna sa propre dague, prête à vendre chèrement sa peau. Une voix d'outre-tombe aux improbables intonations féminines se fît alors entendre :
« Bonjour mignonne. C'est que tu te débrouillerais pas trop mal pour une novice mais dis-moi, tu pensais pouvoir passer combien de temps ici sans que l'on te remarque?
- …Qui es-tu et que me veux-tu?
- On m'avait bien dit que les trollesses étaient farouches. Bien, dans ce cas allons-y de façon plus directe : si tu restes ici plus longtemps sans avoir la moindre idée du fonctionnement de la ville, tu finiras au mieux plumée. Au pire bouillie.
- Et en quoi est-ce que cela te concerne?
- Ca me concerne que je suis en train de me chercher un apprenti, et qu'il serait gâché que de te voir en prison. Le métier devient dur seule, j'aurais besoin d'un aide à qui transmettre mon savoir. Mon... art.
- Métier? Art? C'est à dire?
- Mais le vol et l'assassinat, bien évidemment mon coeur. Si tu acceptes de m'aider dans mes affaires, je te montrerais et t'enseignerais ce que je sais. Tout ce que je veux en échange est que tu obéisses aveuglément à ce que je te demanderais, sans t'encombrer de morale ou d'une quelconque idée de justice. Si tu n'es pas en mesure de me donner ce que j'exige, je te laisserais. Mais tu ne tiendras pas deux jours de plus.
Jen'zua réfléchît quelques instants puis accepta, vaincue. C'était sa première rencontre avec Delia, son mentor, son professeur, mais aussi au fil du temps son amie. Elle était une Mort-vivante qui avait renié toute allégeance pour poursuivre sa carrière d'Assassin, sévissant surtout dans les villes neutres telles celles des Gobelins. Elle avait acquis une bonne réputation au fil de ses contrats et pouvait se permettre une certaine notoriété.
Elle avait initié Jen'zua aux bases de son Art en six mois, puis lui avait donné son surnom, Lyn, en mémoire de celle qui lui avait tout appris. Elle portait de grands espoirs en la jeune trollesse, sachant qu'un jour elle la surpasserait. Mais elle ne devait jamais voir ce jour.
Au cours d'un contrat, trois années plus tard, elle se fît tuer. Leur employeur les avaient dupées et avait envoyé une dizaine de tueurs les accueillir ; seule Lyn avait pu en réchapper, emportant avec elle l'arme de poing que Delia lui avait offerte avant de mourir. Elle la vengea la semaine suivante, en tuant puis découpant en dix morceaux leur précédent employeur, se jurant de ne plus jamais accorder sa confiance à personne. Son arme de poing serait là pour le lui rappeler, à toute heure.
C'était cette même arme dont elle regardait les lames luire sous les flammes. Après avoir évoqué ses souvenirs, Lyn se rendît compte de l'heure tardive. Il était important qu'elle dorme, elle avait rendez-vous le lendemain à Orgrimmar avec un riche commanditaire. Elle travaillait seule depuis plusieurs années, mais rien ni personne n'avait su remplacer la compagnie de son ancien professeur : une haine froide et calculatrice coulait en elle, repoussant tout les autres sentiments qu'elle aurait pu éprouver. Elle était seule, à nouveau. Mais elle n'avait plus peur.
Dernière édition par Lyn le Jeu 9 Juil - 10:45, édité 4 fois
j'ai tellement l'habitude de dire Ratchet que je ne m'en suis pas aperçue !
